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    2015 - Normando Santos Retour  Retour à la liste
Normando Santos
     ©Robert Pasquier
© Robert Pasquier

Je suis une des racines de la Bossa Nova.
Mon histoire a commencé quand Roberto Menescal a découvert que je chantais.
Il était dans ma classe du soir au Lycée Mallet Soares, à Copacabana.
Cela s'est passé plus ou moins vers 1955.
Une nuit, en sortant du Lycée, il m'a emmené chez Nara Leão, celle qui deviendra par la suite la Muse de la Bossa Nova.
Nous habitions dans le même quartier, alors nous sortions du Lycée toujours ensemble.
Notre amitié a grandi.
Nous étions comme deux frères.
Peu de temps après, chez Nara, j'ai rencontré Ronaldo Bôscoli et Chico Feitosa et bien d'autres moins connus en France.
Je dois dire que je ne suis pas de Rio, je suis de Recife, de sorte que toutes ces amitiés étaient nouvelles pour moi.
J'ai rencontré Carlos Lyra chez une de mes élèves.

Comme tout artiste, le talent arrive à un âge précoce et dans mon cas, je chantais.
Alors, ma mère a décidé de m'acheter une guitare et d'embaucher un professeur.
Mais il arrivait toujours quand je jouais au football dans le jardin de notre maison, de sorte que les leçons duraient peu de temps alors la guitare est allée vers le haut de l'armoire, dans ma chambre.
Des années plus tard, j'ai découvert que chanter et jouer de la guitare, allait beaucoup faciliter le contact avec les filles.
J'étais alors un peu timide.
Et voilà comment la guitare est redescendue du haut de mon armoire! Ensuite, tous les amis qui jouaient mieux que moi sont devenus mes professeurs.
Quand je suis arrivé à Rio, je jouais de la guitare carrée avec des accords majeurs, mineurs et septième.
Mon ami Carlos Lyra avait eu un professeur venu des États-Unis, et il lui avait appris les accords dissonants écrits avec les chiffres.
J'ai pu en profiter et m'intéresser définitivement à la guitare.
La chose la plus importante pour ceux qui veulent jouer d'un instrument, c'est d'avoir d'autres amis qui ont la même passion, parce que nous nous améliorons plus rapidement !

En 1964, je suis venu en France pour remplacer Baden Powell à Paris.
Non seulement la musique était toujours une raison d'être ensemble, mais aussi il y avait la pêche sous-marine !Menescal, Ronaldo, Chico et moi nous avons même loué une maison sur la plage à Rio das Ostras, où nous étions presque tous les week-ends. C'était les années de la Bossa Nova...C'était les années dorées...

Je suis allé à Rio parce que j'avais commencé à chanter à la "Radio Jornal do Comercio" dont le slogan était: "Pernambuco parlant au monde".
Comme ma mère ne voulait pas que je chante à la Radio, parce qu'elle disait qu'un chanteur de radio n'avait pas d'avenir et surtout que sa vie était synonyme de "bohème", j'ai promis que si elle me laissait vivre à Rio, je ne chanterais plus à la radio et j'ai respecté ma promesse...Plus tard , j'ai chanté à la télévision !

Dans le "Jornal do Brazil" de 07/02/1960, le journaliste Pedro Müller a écrit que j'étais le "Sinatra de la Bossa Nova".
Au début, j'étais juste un chanteur, je ne pensais pas à composer, mais un jour, quand Carlos Lyra m'a montré une chanson qui ne me plaisait pas alors il m'a demandé pourquoi je n'en écrivais pas.
Je suis rentré à la maison avec cette idée en tête.
"Et pourquoi pas ?"
J'ai alors composé la musique de "Deixa o nosso amor" et lorsque je l'ai montrée à Ronaldo, il m'a fait beaucoup de compliments et il a écrit les paroles.
Ronaldo était mon premier partenaire...
Mes autres partenaires ont été Billy Blanco, Vinicius de Moraes, Geraldo Cazé, Lula Freire...
Avec la Bossa Nova, nous sommes devenus les trois plus importants professeurs de guitare de l'époque: Carlos Lyra, Menescal et moi.

J'ai toujours été très ami avec João Gilberto.
Il apparaissait dans mon appartement très tard dans la nuit, venant de chez Tom Jobim apportant souvent des musiques "sorties du four", telles que "Corcovado ou Garota de Ipanema".
Parfois, il finissait par dormir à la maison, parce que nous bavardions jusqu'au petit matin.
Une fois, João m'a demandé si je pouvais lui donner quelques-uns de mes élèves.
Je choisis deux élèves qui recevaient des leçons ensemble et j'ai tout expliqué.
Ça serait une leçon par semaine de 45 mn , et il serait payé d'avance pour le nombre de leçon du mois .

Quinze jours après, les étudiants sont venus me demander des nouvelles de João qui avait disparu.
Je leur ai demandé s'ils avaient apprécié la leçon et ils ont répondu que cela leur avait plu .
En fait João avait chanté pendant deux heures, puis était parti.
Lorsque je me suis plaint à lui, il a dit que finalement il ne savait pas enseigner et qu'il allait rendre l'argent aux élèves et c'est ce qu'il a fait...
Mes élèves les plus connus du public sont les actrices Betty Farias et Odette Lara, la journaliste Nelson Motta, le guitariste Jards Macalé...

Avant de venir m'installer à Paris, beaucoup de mes chansons avaient été déjà enregistrées.
En 63 et 64 "Mais valia não chorar" par Simonal, "Depois do amor" par Maysa et Sergio Ricardo, "Amor é você" par Pery Ribeiro, "Amor no samba" par le Trio Irakitan et moi-même j'avais enregistré à l'Odéon après mon retour de New York, où je chantais au Carnegie Hall.

Ainsi, je suis une des racines de la Bossa Nova.
Une musique qui est devenue un classique populaire.
Dans 50 ans, elle suscitera encore par sa richesse l'intérêt des futures générations des musiciens et du public !



Normando Marques Dos Santos
Parrain du Festival Bossa Nova 2015